5 août 2016

[DICI] France : Un prêtre égorgé durant une messe

SOURCE - DICI - 5 aout 2016

Le P. Jaques Hamel, âgé de 85 ans, a été égorgé par deux islamistes dans la matinée du 26 juillet 2016, alors qu’il était en train de célébrer la messe dans son église de Saint-Etienne-du-Rouvray, près de Rouen, au nord-ouest de la France. Les deux jeunes terroristes ont également grièvement blessé un paroissien et pris en otage deux religieuses et une fidèle, présents au moment de l’attaque. Prévenues par une religieuse qui avait réussi à s’enfuir, les forces de l’ordre ont abattu les assaillants. Ceux-ci étaient connus des services de police pour avoir tenté de rejoindre la Syrie en 2015, afin de combattre aux côtés de l’Etat islamique. Ils étaient fichés « S », pour « atteinte à la sûreté de l’Etat ». L’un des deux assaillants, âgé de 19 ans, avait été libéré en mars 2016 et assigné à résidence sous surveillance électronique. D’après le lefigaro.fr du 26 juillet 2016, il avait benoîtement assuré au magistrat « regretter ses tentatives de départ ». Le parquet avait fait appel pour qu’il reste en détention, en vain.


Le pape François déclare que « toutes les religions veulent la paix »


Le président de la République française, François Hollande, s’est rendu sur place avant de prononcer une brève allocution depuis l’Elysée au cours de laquelle il a déclaré, sans sourciller, qu’attaquer « une église, tuer un prêtre, c’est profaner la République ».

Le jour même de l’assassinat, l’archevêque de Rouen était à Cracovie, en Pologne, pour les Journées Mondiales de la Jeunesse (JMJ). Mgr Dominique Lebrun a réagi à la mort du P. Hamel dans un communiqué diffusé par la Conférence des évêques de France (CEF) : « L’Eglise catholique ne peut prendre d’autres armes que la prière et la fraternité entre les hommes. Je laisse ici des centaines de jeunes qui sont l’avenir de l’humanité, la vraie. Je leur demande de ne pas baisser les bras devant les violences et de devenir des apôtres de la civilisation de l’amour ».

Dans l’avion qui le menait à Cracovie pour les JMJ, le 27 juillet, le pape François a évoqué la mémoire du P. Hamel, « ce saint prêtre », « mort dans un moment où il offrait ses prières pour toute l’Eglise ». Selon l’agence I. Média, le pape a assuré que le monde connaissait « une guerre en morceaux » qui succède à la guerre de 1914-1918 et à celle de 1939-1945. Une guerre « organisée », mais pas « de guerre de religions, non ! Toutes les religions veulent la paix et, les guerres, ce sont les autres qui les veulent ». Le pape a alors fustigé « les guerres d’intérêts, les guerres pour l’argent, les guerres pour les ressources de la nature, les guerres pour dominer les peuples ».


Le CFCM appelle les musulmans à se rendre à la messe


Une réunion a été organisée le 27 juillet, à l’Elysée, avec des responsables de toutes les religions. Les représentants des cultes ont voulu « affirmer avec force une solidarité sans faille face à la barbarie », selon les termes rapportés par le site de France Télévision. Cité par ce média, le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris, a déclaré de façon irénique : « Les relations particulièrement harmonieuses qui existent entre nos différentes religions en France constituent une ressource importante pour la cohésion de notre société. C’est-à-dire que nous ne pouvons pas nous laisser entraîner dans le jeu politique de Daesh qui veut dresser les uns contre les autres les enfants d’une même famille. » A ses côtés, le recteur de la Grande Mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, a exprimé la « sidération » des musulmans et a assuré les catholiques de leur solidarité, d’après l’AFP. En fin de journée, une messe a rassemblé, sous haute sécurité, environ 1.500 personnes à la cathédrale Notre-Dame de Paris, en présence de François Hollande, de responsables politiques, religieux et de nombreux anonymes.

Dans un communiqué publié le 28 juillet, Anouar Kbibech, président du Conseil Français du Culte Musulman (CFCM), a appelé les musulmans à exprimer leur « solidarité » et leur « compassion ». Il a même invité « les responsables de mosquées, les imams et les fidèles qui le souhaitent à se rendre à la messe », le dimanche 31 juillet.


Des cérémonies interreligieuses dans tout le pays


En réponse, la Conférence des évêques de France (CEF) a invité, dans une note publiée le 29 juillet sur son site internet, toutes les églises du pays à réserver un « accueil fraternel » aux musulmans qui voudraient s’y rendre. « C’est une occasion de montrer que les catholiques ne confondent pas islam et islamisme, musulman et djihadiste. Si les grandes religions sont capables de montrer leur ouverture et leur dialogue, leur recherche réciproque de se connaître mieux, alors indiqueront-elles peut-être une voie pour plus de dialogue dans l’ensemble de la société ».

Le même jour, qui fut décrété journée de jeûne et de prière par la CEF, le P. Auguste Moanda, curé de la paroisse de Saint-Etienne-du-Rouvray, dont le P. Hamel était l’auxiliaire, a prêché dans la mosquée de la ville. A l’entrée de la mosquée Yahia qu’un simple portail relie à la paroisse catholique, des affiches proclament « Mosquée en deuil ». Le Figaro rapporte qu’avant la prière du vendredi, en début d’après-midi, « le prêtre s’est adressé à une assistance très nombreuse, dans laquelle figuraient plusieurs dizaines de chrétiens ». Le P. Moanda a « pointé le risque d’amalgame », après la revendication de l’attentat par le groupe Etat islamique (EI) » et a assuré que « ce que l’on voit, ce n’est pas le vrai islam. Nous devons nous serrer les coudes ».

A Toulouse, environ 200 musulmans et catholiques ont marché ce même 29 juillet pour montrer leur « solidarité » et leur « tristesse ». A La Rochelle, une marche à l’appel d’une organisation culturelle islamique a rassemblé quelque 200 personnes, dont le maire et le député. A Périgueux, 70 à 80 personnes ont participé à une marche œcuménique.

Le 30 juillet, des veillées interreligieuses se sont tenues dans le pays. Selon France Soir, « dans une église de Saint-Etienne-du-Rouvray, face au portrait du P. Hamel encadré de bouquets de fleurs, fidèles catholiques et musulmans ont écouté avec attention les paroles d’apaisement du P. Moanda, qui a rappelé que ‘la fraternité existe entre les deux religions’. » A Bordeaux, environ 300 personnes ont célébré à l’église Notre-Dame « un temps de recueillement et de prière ». Les représentants de la communauté musulmane, dont l’imam de la mosquée de Bordeaux, Tareq Oubrou, accompagnés d’une dizaine de fidèles, hommes, femmes et enfants, se sont mélangés aux paroissiens.

A la cathédrale de Rouen, parmi le millier de personnes à se rendre à la messe du dimanche 31 juillet, une centaine de musulmans ont répondu à l’appel du CFCM. D’après France Soir, on pouvait lire sur une affiche accrochée à l’intérieur du lieu de culte par une association musulmane : « Amour pour tous, haine pour personne ». Dans son sermon, Mgr Lebrun, archevêque de Rouen les a remerciés « au nom de tous les chrétiens. Vous affirmez ainsi que vous refusez les morts et les violences au nom de Dieu. Comme nous l’avons entendu de vos bouches que nous savons sincères, ce n’est pas l’islam».

A Nice, rapporte le quotidien La Croix du 31 juillet, théâtre d’un attentat revendiqué par l’Etat islamique le 14 juillet qui a coûté la vie à 84 personnes, une dizaine de responsables religieux musulmans se sont rendus à l’église Saint-Pierre-de-l’Ariane. « La mort du prêtre Hamel nous donne une responsabilité et un devoir historique de continuer son œuvre de paix », a déclaré à l’AFP Otmane Aissaoui, imam de la mosquée Arrahma. Dans toute la France, des messes ont été célébrées : à Lens, à Amiens, dans le nord, ou encore à Clermont-Ferrand, dans le centre du pays.

Contre cet unanimisme « politiquement correct », le colonel Georges Michel a tenu à rappeler dans une tribune, publiée par Boulevard Voltaire le 1er août, que « la messe, source et sommet de la vie chrétienne, n’est pas une réunion mondaine, un meeting, une fête du ‘vivre ensemble’ et ce, malgré tous les efforts remarqués d’un clergé postconciliaire pour en arriver là. » Le site d’information catholique en ligne Le Rouge & le Noir a dénoncé, dès le 29 juillet, « les procédés ordinaires » qui « cherchent à préserver la paix civile en rejetant, à toute force, la responsabilité collective des musulmans dans les massacres commis au nom de l’islam. » Et de rappeler « le peu de cas que font les musulmans de la liberté de culte, et l’interdit régnant de fait sur toute conversion d’un des leurs au christianisme ».


Le pape François assimile « violence islamique » et « violence catholique »


Interrogé dans l’avion à son retour de Pologne, le pape François a exposé sa vision des attentats perpétrés au nom de l’islam. Ses propos ont été repris par Le Figaro le 1er août 2016. Il a déclaré ne pas aimer « parler de violence islamique, parce qu’en feuilletant les journaux je ne vois tous les jours que des violences, même en Italie : celui-là qui tue sa fiancée, tel autre qui tue sa belle-mère, et un autre… et ce sont des catholiques baptisés, hein ! Ce sont des catholiques violents. Si je parle de violence islamique, je dois parler de violence catholique (…) Une chose est vraie : je crois qu’il y a presque toujours dans toutes les religions un petit groupe de fondamentalistes. Nous en avons. »

Réagissant à ces propos, Benoît Dumoulin, sur le site Nouvelles de France le 1er août, écrit que le pape François met « au même niveau la violence domestique et celle qui obéit aux injonctions de certaines sourates du Coran ». Pour le journaliste français, cela « procède d’une profonde confusion intellectuelle » car « à aucun moment », les « actes de violence ne reçoivent, dans le catholicisme, une quelconque forme de légitimation religieuse par un texte ou une autorité sacrés ». Ce qui n’est « malheureusement pas le cas en islam ».

Avant même la déclaration du pape, l’Agrif avait noté, sur son site le 28 juillet 2016, que le pape François « se garde de faire observer que l’islam est (…) un système idéologico-religieux, une théocratie totalitaire. Il n’en parle que comme une religion et il répète que toutes les religions sont porteuses de paix. La vérité pourtant, c’est que cette globalisation n’est corroborée ni dans le passé ni dans le présent. » Et de conclure : « La cause du terrorisme est dans l’islamisme et la cause de l’islamisme dans l’islam. »


« Daesh n’a rien fait contre la loi islamique »


Mais « que doit-il arriver » pour que le pape comprenne « l’effrayante situation dans laquelle se trouve aujourd’hui non seulement l’Occident, mais l’Eglise universelle tout entière ? » s’interroge Roberto De Mattei le 28 juillet 2016 dans Correspondance européenne. « Ce qui rend terrible cette situation, c’est la politique d’angélisme et de fausse miséricorde envers l’islam et tous les ennemis de l’Eglise. » Et l’universitaire italien poursuit : « Certes, les catholiques doivent prier pour leurs ennemis, mais ils doivent aussi être conscients qu’ils en ont, et ne doivent pas se limiter à prier pour eux : ils ont aussi le devoir de les combattre. »

Ahmed Aboutaleb, le maire de Rotterdam, aux Pays-Bas, d’origine marocaine, a accordé un entretien àL’Observateur du Maroc et d’Afrique daté du mois d’août 2016. Il y déclare que « lorsqu’on entend les réactions musulmanes actuelles selon lesquelles ce ne sont pas des vrais musulmans qui ont commis ces actes ou que ce n’est pas l’islam, cela reviendrait à dire que ce ne sont pas les Etats-Unis qui ont mené la guerre au Vietnam parce que ce n’est pas cela les vrais Américains ». Il insiste sur le fait que « les musulmans doivent se demander pourquoi le Coran peut être si souvent utilisé pour revendiquer des actes meurtriers et cesser de s’enfermer dans des schémas victimaires. » Et il rappelle fort justement que « l’Etat islamique publie sur internet une revue en anglais (…) et même en français (…) dans laquelle l’ensemble des articles est truffé de références au Coran, à des Hadith, et à un nombre considérable de penseurs (…) comme Ibn Taymiyya ou Mohammed Ben Abdelwahhab, le fondateur du wahhabisme. »

Des propos que confirme le père jésuite Samir Khalil, islamologue de l’Université Saint-Joseph de Beyrouth et intervenant auprès de plusieurs universités pontificales. Dans un entretien mis en ligne par le site de vidéos catholiques EUK Mamie et repris par reinformation.tv, le 21 juillet, le religieux est formel : « Daesh, l’Etat islamique, n’a rien fait contre la loi islamique. Il a appliqué ce qui se trouve dans le Coran ou dans la vie de Mahomet, et dans ses paroles. »


« Que la chrétienté sorte enfin de sa torpeur »


Dans un communiqué publié sur La Porte Latine le 26 juillet, l’abbé Christian Bouchacourt, supérieur du District de France de la Fraternité Saint-Pie X déplore qu’on rejette « la faute sur un prétendu ‘islamisme’, mais il s’agit d’un écran de fumée (…) Il est grand temps que nos hommes politiques et les autorités catholiques mettent un terme à un angélisme mortifère qui encourage l’extension de l’islam dans notre pays, par exemple en favorisant l’ouverture de nouvelles mosquées ou de prétendus ‘centres culturels musulmans’. Et de s’interroger : « Combien faudra-t-il de nouvelles victimes pour que la chrétienté sorte enfin de sa torpeur ? » 


(Sources : apic/imedia/lefigaro/cef/francesoir/lacroix/ bvoltaire/lerougeetlenoir/lagrif/ francetvinfo/ correspondanceeuropeenne/lobservateurdumaroc/reinformation.tv/lpl/ndf – DICI n°339 du 05/08/16)